La réforme de la facturation électronique en France repose sur un principe fondateur : chaque facture doit clairement identifier un vendeur et un acheteur. En théorie, ce principe semble simple et évident. Mais dans la réalité des entreprises, cette règle se heurte à une multiplicité de cas d’usages qui rendent son application complexe (multi-facturation, sous-traitance, auto-facturation, affacturage…) Autant de cas qui nécessitent une analyse approfondie et une préparation rigoureuse pour éviter toute confusion ou non-conformité.

Qu’est-ce qu’un cas d’usage en facturation électronique ?

Un cas d’usage désigne une situation concrète qui va au-delà du cadre standard de facturation un vendeur -> un acheteur.

 La norme XP Z12-014 recense 36 cas d’usage, répartis en trois grandes catégories :

  • Cas liés aux données de facturation : ils nécessitent l’ajout de données additionnelles ou l’adaptation de certaines règles de gestion, avec par exemple l’utilisation du profil EXTENDED-CTC-FR.
  • Cas impliquant des tiers (ex : mandataire, affactureur) : ils soulèvent la question du partage et de gestion du cycle de vie des factures avec ces acteurs externes. 
  • Cas ayant un impact sur le cycle de vie : généralement liés à l’intervention de tiers, ils concernent aussi la gestion des rejets, refus, litiges… qui nécessitent l’émission de plusieurs factures, factures rectificatives ou avoirs pour traiter la facturation de la transaction sous-jacente.

👉 Vous pouvez retrouver tous les cas d’usage dans ce tableau récapitulatif.

Les acteurs impliqués

Dans chaque cas d’usage, plusieurs acteurs peuvent intervenir :

  • VENDEUR (ou fournisseur) : émet la facture, la comptabilise dans ses comptes (en produits ou acomptes), collecte et déclare la TVA collectée.
  • ACHETEUR (ou client) : comptabilise la facture dans ses comptes (en charge, stock, immobilisation ou acompte), déclare la TVA déductible et règle la facture.
  • REPRÉSENTANT FISCAL : agit au nom du vendeur pour sa déclaration de TVA.
  • BÉNÉFICIAIRE : reçoit le paiement quand ce n’est pas le vendeur (ex. affactureur).

Le profil EXTENDED-CTC-FR a également inclus d’autres acteurs pour couvrir des cas plus complexes :

  • FACTURANT : tiers mandaté pour créer et émettre la facture au nom du vendeur.
  • AGENT DE VENDEUR : agit pour le compte du vendeur (vente, facturation, recouvrement).
  • ADRESSÉ À : tiers désigné pour traiter la facture au nom de l’acheteur.
  • AGENT D’ACHETEUR : intervient pour le compte de l’acheteur, notamment pour la commande et le suivi des statuts (approbation, litiges…).
  • PAYEUR : règle la facture à la place de l’acheteur (ex. société d’un groupe en charge des paiements des filiales, sous-traitance avec paiement direct du client final…).

Acteurs techniques

  • PA (Plateformes Agréées, anciennement Plateformes de Dématérialisation Partenaires ou PDP) : ces plateformes, immatriculées par l’Etat, sont les seules habilitées à échanger les factures B2B domestiques (« e-invoicing »), et à transmettre les flux 1, 10 (e-reporting) et les statuts obligatoires au Concentrateur de Données du Portail Public de Facturation (CDD PPF).
  • SC (Solutions Compatibles, anciennement Opérateurs de Dématérialisation ou OD) : prestataires ou solutions de gestion qui interviennent en amont et en aval de l’échange de factures et de cycles de vie entre entreprises et PA.
  • PPF (Portail Public de Facturation) : gère l’annuaire des assujettis et leurs adresses de facturation électroniques. Il joue aussi le rôle de Concentrateur de Données (CDD) qui réceptionne le flux 1, 10 et 6 pour les statuts obligatoires (Déposée, Rejetée, Refusée, Encaissée).

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Comment identifier ses cas d’usage ?

L’importance de cartographier les flux

La cartographie des flux de facturation est la première étape pour toute entreprise. Elle permet de distinguer :

  • Cas simples : 1 vendeur → 1 acheteur
  • Cas hybrides : 1 vendeur → plusieurs acheteurs ou plusieurs vendeurs → 1 acheteur
  • Cas complexes : intervention d’un tiers (mandataire, affactureur, etc.)

Au-delà d’une simple analyse, la cartographie constitue un outil stratégique pour classifier les transactions et anticiper les situations complexes. Elle permet aussi aux plateformes agréées (PA) de traiter plus efficacement la diversité des scénarios de facturation auxquels elles seront confrontées.

👉 Notre conseil : sollicitez l’accompagnement de votre prestataire. Certains, comme Symtrax, proposent des ateliers dédiés « cas d’usage » qui peuvent vous aider à : 

  • Clarifier les rôles de chacun,
  • Sécuriser les échanges,
  • Eviter les zones d’ombre qui pourraient compromettre votre conformité.

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Le rôle central des Plateformes Agréées (PA)

Les Plateformes Agréées occupent une place essentielle dans la réforme, mais elles ne suffisent pas à elles seules à couvrir l’ensemble des besoins. La norme AFNOR XP Z12-014 recense en effet 36 cas d’usage, qu’aucune PA n’a obligation de traiter intégralement. Leur mission consiste néanmoins à :

  • Prendre en charge la majorité des cas d’usage,
  • Proposer des mécanismes alternatifs pour les cas hors périmètre,
  • Garantir la traçabilité et l’interopérabilité tout au long du cycle de vie de la facture.

À ce titre, le choix d’une plateforme n’est pas anodin. Des solutions comme celle de Symtrax, Compleo Invoice Platform (CIP), permettent de garantir la conformité des échanges commerciaux. 

Toutefois, la réussite de la réforme ne dépendra pas uniquement des outils, mais de la manière dont chaque entreprise saura exploiter et paramétrer ces solutions en fonction de ses propres cas d’usage.

Des responsabilités partagées et une démarche collaborative

La norme AFNOR clarifie les rôles de chaque acteur :

  • Le vendeur conserve la charge de l’émission, de la transmission, de l’encaissement et de la mise à jour des statuts des factures.
  • L’acheteur doit assurer leur réception, leur validation, le paiement ainsi que la gestion des litiges.
  • Les plateformes agréées doivent contrôler et transmettre les flux, tout en gérant le cycle de vie de la facture.
  • Enfin, les solutions compatibles (OD) et autres intermédiaires (affactureurs, mandataires…) interviennent selon le modèle choisi par l’entreprise.

Il apparaît donc que la réussite de la transition repose sur une approche collaborative. Aucun acteur ne peut porter seul la charge de la conformité : vendeurs, acheteurs, prestataires techniques et intermédiaires doivent harmoniser leurs pratiques et clarifier leurs rôles afin d’éviter toute incohérence et de fiabiliser les échanges.

Conclusion : transformer une contrainte en opportunité

La facturation électronique et la gestion de ses cas d’usage ne doivent pas être perçues comme une contrainte administrative, mais comme une opportunité. Elles permettent aux entreprises de :

  • Sécuriser leurs flux financiers,
  • Renforcer la traçabilité des transactions,
  • Améliorer leur efficacité opérationnelle.

Bien préparée, cette transition devient un levier de compétitivité. En identifiant leurs modèles transactionnels, en documentant les rôles des acteurs impliqués et en choisissant des plateformes adaptées, les entreprises transforment une obligation réglementaire en avantage stratégique.

L’enjeu dépasse la simple conformité : il réside dans la capacité à anticiper, structurer et piloter la complexité de ses opérations. C’est dans cette approche proactive que dépendra la réussite durable de la réforme.


Source : La norme XP Z12-014